René LEW – L’institution soigne-t-elle par elle-même?

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René Lew,
les 26-30 octobre 2017,
pour le colloque de l’AECF-Lille, Psychothérapie institutionnelle,
des 25-26 novembre 2017

L’institution soigne-t-elle par elle-même ?1

En dehors de toute théorie de la psychothérapie institutionnelle, je me suis posé de longue date la question de la psychiatrie quant au rôle de l’hospitalisation, ne serait-ce qu’elle, dans le soin psychique, seul registre auquel je me tiendrai. Autrement dit, un trouble psychique se réduit-il, se résout-il aussi ― en plus, voire à la place, de l’intervention dite psychothérapique en « colloque singulier » ― du fait de la réorganisation des liens avec autrui à quoi correspond, dirais-je, l’intervention institutionnelle ? Et cette question peut être étendue à toute institution sanitaire ou médico-sociale.

1. La tendance générale

1.1. Les définitions minimales

Question des liens avec autrui, et à propos de leur réorganisation, on sait que je distingue le collectif et le groupe, et, rapportables à cette distinction, la culture et la civilisation.2 Parler de remaniement des liens avec autrui nécessite de reconsidérer en quoi ce clivage entre culture et civilisation est opérant et en quoi l’institution peut prendre divers caractères, voire des caractères tout à fait opposés. Je terminerai en insistant sur cet aspect des choses (voir le § 5).
Qui plus est la question du temps de présence du patient dans l’institution se surimpose au rôle de celle-ci. Quel temps (sûrement variable selon le sujet en cause, et moins selon le type de « cas » considéré) est-il nécessaire pour obtenir une évolution conséquente des troubles, quelle peut être la gestion du/des temps dans l’institution ?3 Cela implique activités et temps mort, temps subjectif des échanges (c’est un temps moebien) et prise en compte du hors-temps (zeitlos) de l’inconscient, qui n’est cependant pas un non-temps, c’est-à-dire un Unzeit comme chez Heidegger. Le temps de l’inconscient n’a rien d’un temps chronique rectiligne, il est par contre asphérique. Aussi y a-t-il justement à déterminer quelle est la philosophie du soin dans l’institution, précisément cette institution-là qu’on considère, soit ― toujours pour rappeler ce qui a pu y sévir sur le mode de Heidegger ― : « accueil, recueil, recueillement… ». Un aspect théologique y persiste toujours, rappel du temps où les infirmières étaient des bonnes soeurs, voire les « malades » des diabolisés ou des pestiférés au sens propre.
Encore faut-il distinguer l’institution et son appareil : l’institution psychiatrique, par exemple, ne se résume pas à son appareil hospitalier, y compris ouvert sur la ville par les mini-pseudopodes de cet appareil que sont les centres de consultation, voire les lieux d’hospitalisation a minima dotés de quelques lits et fonctionnant en hospitalisation de courte durée.
Parallèlement la prise en compte de l’existence subjective dans le trouble psychique (se donner plus ou moins d’existence, narcissiquement parlant, voire un regain d’existence) joue aussi son rôle : en quoi l’institution peut-elle ou non agréer de tels concepts, non sans lien avec la structure subjective, de manière qu’elle (l’institution) implique ou non un gain de jouissance (Lustgewinn chez Freud, plus-de-jouir de Lacan) à partir duquel la fonction phallique (comme jouissance phallique) prend sa place ― par déconstruction de cet en-plus.
Car, en contrepartie du sujet, l’institution ne fait valoir que la jouissance de l’Autre, en confondant en pratique le symptôme (qui peut être une sortie du trouble, comme le délire dans la psychose ― tel que le conçoit Freud auquel j’emboîte le pas), en confondant le symptôme, donc, et la raison du trouble. Sous cet angle ― et pour aller au plus pressé ―, si cette confusion est bien le cas, l’institution ne saurait être soignante. Bien plus, elle chronicise le symptôme et, derrière lui, la raison du trouble, autrement dit elle fait perdurer la pathologie sans « se résoudre » à essayer d’aider effectivement le patient à s’en démettre. Car il lui appartient, et à lui seul, de résoudre la difficulté qui se présente à lui, symptomatisée hors refoulement.

1.2. La métapsychologie du sujet noyé dans l’institution

Comme, à mon sens, la jouissance phallique met en jeu le temps d’échange propre à la parole, il y a assurément une opposition entre la jouissance phallique, prenant une figuration moebienne (distinction des interlocuteurs malgré et grâce à leur mise en continuité dans la parole), et la jouissance de l’Autre, prenant pour son compte propre (s’il en était) une allure de temps chronique, autrement dit spatialisé de manière, disons, sphérique. Je ne discuterai pas pour autant ici ce texte princeps de Freud qu’est « L’analyse finie et indéfinie » où se fait bien, au travers du questionnement qui se développe au long d’un texte relatif à la psychanalyse, le départage entre temps moebien de l’échange et temps chronique. Le « roc de la castration » y est moins l’objet a de Lacan (lequel objet présente une topologie sphérique) que la fonction même de la récursivité (asphérique) sur laquelle on bute dans la pathologie au profit d’une prédicativité objectale.
Dit autrement, cette question des différences topologiques de temps et de là celles des jouissances renvoie à la différence entre l’intension du temps de la parole et l’extension du temps institutionnel où la parole ne trouve pas nécessairement son « compte ». (Voir P. Legendre : « L’institution n’est pas le lieu de la parole », passim). Autant le temps moebien est récurrentiellement une relance à partir d’un point limite (au sens d’un nombre limite), autant la rupture avec cette asphéricité que réalise le temps chronique ― soit l’échec de la tentative subjective de dialectiser le lien avec l’institution sans plus en dépendre massivement ―, cette
rupture sidère. La psychiatrie en joue même paradoxalement ― dans l’idée de ne pas prolonger outre mesure les hospitalisations ―, en ne considérant qu’un tel temps chronique, à faire sortir rapidement les patients de l’hôpital pour leur éviter de s’y chroniciser, quand, pareillement, une sortie prématurée risque de chroniciser tout autant le trouble. Simplement les « tirants » de cette chronicisation sont reportés sur l’extérieur. D’où l’importance que prend actuellement la psychiatrie extra-muros. En quelque sorte la récurrence du trouble ― comme tentative d’expression, mais aussi de solution du problème sous-jacent ― est bien pointée par un symptôme que je dirai obsessionnel, qu’est le déjà-entendu souligné par Freud. La psychiatrie a toujours déjà « saisi » et compris la teneur du trouble, pris comme pathologie et qu’il faudrait alors éradiquer. Il est vrai que ― comme l’institution psychotise ― elle pervertit aussi par une mise à l’écart (Schonung) dont je fais le ressort de la perversion à suivre ce qu’en dit Lacan dans son séminaire L’angoisse (de façon que le sujet pervers se fasse objet de l’Autre). La mise à l’écart du fonds existentiel de tout trouble psychique le pérennise. C’est que cette objectification correspond au choix du prédicatif des sciences mécanistes contre l’imprédicatif de l’inconscient freudien.
Cette question de la perversion me paraît en fait bien plus fondamentale qu’une spécularité de l’institution avec la perversion comme avec la psychose. De fait une telle perversion touche à mon sens le savoir institutionnel contre le savoir inconscient. Je rappelle la position de Lacan dans sa « Proposition du 9 octobre 1967 sur le psychanalyste de l’École » :

  • « Ce qu’il y a à savoir, peut être tracé du même rapport « en réserve » selon lequel opère toute logique digne de ce nom. Ça ne veut rien dire de « particulier », mais ça s’articule en chaîne de lettres si rigoureuses qu’à la condition de n’en pas rater une, le non-su s’ordonne comme le cadre du savoir. »

L’« en réserve » est précisément Schonung. Sans revenir sur l’interprétation de cette phrase essentielle, je tiens que l’institution refuse le non-su comme cadre du savoir. Elle se veut toute-savante. Par là elle récuse que le signifiant se fonde de la lettre.5 Aussi je conçois aujourd’hui que le pervers ― et de là semblablement l’institution ― en se mettant « en réserve » se veut objet tout-phallique, sans plus mettre en oeuvre de fonction phallique pour faire opérer ce dernier : la réserve phallique n’y trouve pas son compte de nécessité (par exemple dans le miroir, ce qui conduit à la dualité exhibitionnisme (du trouble) / voyeurisme (de l’institution)6 questionnant le pénis symptomatique en place de phallus existentiel). Pareillement l’institution joue d’angoisse en place de jouissance (voir la dualité sadisme / masochisme), même si cette angoisse, tout comme cette jouissance, y concerne d’abord l’Autre plutôt que le sujet.
Si je dis que l’institution psychiatrique, comme le pervers, met en réserve le phallus (soit la fonction de la signifiance fondée de récursivité), c’est qu’elle tend à le matérialiser et par là-même le sujet (pervers) qui se fait le porteur de cette matérialisation, qui est aussi celle du trouble, en déporte le symptôme sur l’institution, toute prête à le recevoir. Un tel travestissement (soit un tel habillage du vide opératoire phallique) déporte en même temps le sujet du narcissisme primordial récursif vers la prédicativité des objets. Cela se fait au détriment de l’inscription phallique en chaînes de lettres (constituant le réseau signifiant).

Autrement dit l’institution, en éloignant le sujet du phallus et de la signifiance, le départit de la parole.
Un tel schéma est la mise à plat d’un plan projectif7, où je souligne en les démultipliant les méridiens valant dans l’évolutivité du lien du sujet du narcissisme primordial avec l’Autre. À tout coup (en psychotisant ou en pervertissant, voire en jouant de stase névrotique) l’institution tend à fixer le sujet au niveau objectal et prédicatif de l’Autre.
Quand je parle des liens institutionnels du sujet avec autrui ― au mieux : dans le collectif ―, avec un tel schéma, il nous faut distinguer les liens longitudinaux (ce sont les méridiens) ― par exemple en allant des soignés vers les soignants « de base » jusqu’à leur hiérarchie ― et les liens latéraux entre soignés (ce sont les parallèles, ici représentées de manière non affine à partir des points-noeud que sont la récursivité phallique et l’ontologie). J’y reviendrai. Une telle barrière entre le normal et le pathologique est toujours à franchir pour le patient ― et ce franchissement met en jeu toute la théorisation de Freud, en particulier avec sa conception de la barrière de contact, prolongée jusqu’au clivage du sujet. Encore faut-il que l’institution lui en laisse le loisir. En effet le clivage freudien est passage, quand le clivage bleulérien est barrage.
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Car si une institution ne suffit pas à maîtriser le sujet, le système (capitaliste, dominant, globalisant et fort de son bon « droit ») n’est pas à court de subterfuges pour subvenir à ses propres besoins et à sa propre pérennisation, sous couvert de soutenir (perversement) l’existence des gens. En l’occurrence alors que ― de 1838 à 1970 ― la psychiatrie a paru jouer le rôle qui lui avait été assigné dans la mise à l’écart des déviants (sans parler des radicalités eugénistes nazies), quand elle a semblé battre de l’aile, désaliénisme aidant, le système a retourné ce rôle en ouvrant la psychiatrie sur la ville, mais en enfermant de nouveaux marginaux dans cette ouverture10 en les radiant non plus de la société active, mais du travail lui-même. Ce fut ― non sans gradient11 d’inscription des gens dans cette nouvelle institution ― l’instauration du « handicap ». Contre l’identification longitudinale à la fonction Père comme productrice fut portée au pinacle l’identification latérale, dite hystérique par Lacan. L’extension de la pathologie (factice) a pris dès lors le pas sur l’intension existentielle. Le groupe des marginaux cessait d’être organisé sur le mode de l’Église ou de l’Armée (comme succédanés « uniens » de l’unarité signifiante) et prenait ― en masse ― une structure de collection (quand même distincte d’un collectif). Il suffit de considérer l’inflation bien réelle de l’autisme au moins en France aujourd’hui pour juger de l’impact de l’institution du handicap sur la pathologie à partir de l’idéologie insidieuse de laissés-pour-compte. L’armée de réserve (!) du chômage chez Marx est remplacée par la théologie scientifique du cognitivisme et des neuro-sciences qui balaient le fondement récursif de la signifiance en allant jusqu’à développer d’autres modes de réification du sujet. L’autisme date de 1911 (Bleuler et la schizophrénie) ― en n’étant pas alors sorti de la psychiatrisation des troubles ― et surtout de 1943 (Kanner) en devenant un phénomène social ― propre alors, aux États-Unis, aux classes petite-bourgeoises ― que je rattache aujourd’hui à la théorie des choix rationnels (TCR)12 avec son fondement de taylorisme.
Dans tout mon propos ― du temps d’hospitalisation en psychiatrie à l’inscription dans telle ou telle veine sociale (et rhétorique, c’est de topoï eugénistes qu’il s’agit) ― il n’est en rien question de gravité des troubles, ni tant de leur causalité13, ni même de sociologie (quoique l’autisme touche aujourd’hui en France surtout les enfants d’immigrés : une rupture symbolique est là à l’oeuvre), que de ce que les lois appellent « orientation », ainsi en est-il de la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées de 1975, revue en 2002 selon l’avancée des nécessités capitalistes et la gestion des financements, laquelle loi a pour fonction d’orienter les gens dans des places prédéterminées ― si tant est que les pouvoirs publics les leur crée.
Au fond dans tout cela, la détermination de l’institution (en tant qu’Autre) n’apparaît pas tant dans le fait qu’elle se soutienne comme Autre, ou ne serait-ce qu’en devenant elle-même support de jouissance Autre, en ramenant (ou en visant à ramener) le symptôme vers soi, mais sa fonction se soutient de faire maintenant du sujet lui-même un symptôme, là encore pour ramener le sujet à une détermination univoque par l’Autre. Et ― n’y pouvant mais, de prime abord ― le sujet se prête à cette aliénation qui le fait disparaître comme tel (c’est son fading) au profit du seul moi idéalisé par l’institution et donc à l’encontre de tout engendrement narcissique que Lacan nomme « sé-paration », de façon appropriée pour indiquer par là, dans l’équivoque, qu’il s’agit aussi de se séparer de la gouverne institutionnelle.

2. Pratique de l’institution

2.1. L’organisation de l’institution

Pour repréciser les choses, j’appelle plus exactement « institution » un double rapport à l’instauration d’un discours, au sens de Lacan. Pour le coup, une institution est organisée par une telle écriture de la signifiance qu’est un discours : S1/S/ → S2/a. De sujet de la signifiance fonctionnant comme narcissisme primordial le sujet en devient (fantasmatiquement, mais un barrage vient à interdire même l’asphéricité du fantasme) objet de significations (Bedeutungen) préinvesties. De là, il s’agit d’en considérer « l’institution », soit (ou à la fois) sous l’angle de l’action en jeu (alors l’institution n’est que fonctionnelle), soit sous l’angle du support lui-même institué de cette action et de ce discours, et de là l’appareil organisationnel qui s’en fait le maître d’oeuvre.
Commençons par cet appareil. Soit il se présente en tant que collectif plus ou moins ample et structuré, soit il se présente en tant que groupe, plus ou moins ample et structuré. Freud a défini la structure du groupe (de la foule, de la masse). Elle est fondée de l’étalonnage des objets des membres du groupe par le leader, à l’aune de son propre objet. Les idéals du moi de chacun en dépendent et opèrent à l’unisson, en étant eux-mêmes identifiés entre eux, et ils en identifient à partir de là pareillement entre eux les membres du groupe. Sous cet angle, une institution identifie comme d’un seul tenant ses membres (les « fous » en psychiatrie). Mais quel est le leader d’une telle institution ? La folie d’un tel appareil est qu’il se passe de leader et qu’il fonctionne selon un vide objectalisé, dans lequel on peut reconnaître le ressort de la psychose. L’institution ― ai-je tendance à soutenir ― est pour le moins le pendant spéculaire de la psychose. Elle réalise l’imprédicativité de l’adage lacanien qui indique qu’il n’y a pas d’Autre de l’Autre. Autrement dit elle le fait fonctionner strictement de manière prédicative, toute dialectique du sujet avec l’Aure mise à part (Schonung toujours). Au fond ce ne peuvent être « les soignants » (l’alternative aux soignés) qui constituent un « leader collectif » du groupe des soignés, ni le chef de service (de pôle, dit-on aujourd’hui), ni même le directeur de l’hôpital ou le ministre de la santé. Quoi qu’on en pense, les soignés y sont ramenés à eux-mêmes, ce qui somme toute n’est pas une si mauvaise chose. Retenons par contre ici, dans l’enceinte de l’hôpital psychiatrique, la réification du vide signifiant en vide consistant. Et je crains que ce ne soit pas différent dans une quelconque clinique. Y compris si celle-ci se veut opérer sur le mode de la dite « psychothérapie institutionnelle ». Ici il faudrait que les tenants de celle-ci répondent à mes questions, d’abord en précisant la distance entre clinique psychothérapique institutionnelle et hôpital psychiatrique. Puis en précisant en quoi la psychothérapie institutionnelle ne chronicise pas. À mon avis, la psychiatrie, sous quelque tournure qu’elle apparaisse, ne soutient en rien l’existence de quiconque, ni sa jouissance.
Par contre un collectif se fonde, non plus de l’objet commun, mais des interconnexions diversifiées entre ses membres, directement entre eux, sans plus la médiation d’un objet14, même si ces connexions sont identiques du point de vue de chacun. Leur fonctionalité suffit à déterminer la particularité de chacun dans le lot commun des interconnexions.15 Et c’est cette fonctionalité qu’on peut dire signifiante.16
Au total, pour considérer la fonction de l’institution dans le soin, il faut à la fois prendre en compte ce qu’elle est assurément comme fonction, mais aussi comme appareil, soit à prédominance encore fonctionnelle avec le collectif, soit objectalisé comme groupe. Un groupe se présente donc aux travers de son organisation, elle-même directement accessible : chefferie et orientation décisionnelle préconstituée, hiérarchie des personnes et des actions par délégation du chef, ordre des nécessités (de là la contradiction des temps de présence raccourcis dans l’institution en psychiatrie et la pérennisation des troubles par les « traitements » ambulatoires par neuroleptiques retard), rythme imposé, discours standardisé et commun, absence de remise en question…

2.2. Les modes d’action de l’institution

L’action thérapeutique de l’institution en elle-même me paraît souhaitable. Elle dépend, quoi qu’il en soit, de son organisation.
L’organisation groupale me semble donc aller contre les sorties subjectives des troubles. En effet elle enferme le sujet dans le groupe avec toutes les facticités (prédicativités, réifications, survalorisation,…) que le groupe traîne avec soi, en particulier sous deux abords souvent conjoints : d’une part, il peut s’agir d’un délire ― y compris ce qu’on peut appeler un délire idéologique de groupe ― et, d’autre part, il peut s’agir d’une mise en « camp » ― au sens le plus large qu’on peut donne à ce terme17, mais dont le paradigme extrême est le camp de concentration passé à l’extermination ― et la médecine ségrégative, eugénique et raciste, a bien prouvé, avec les camps nazis, comment elle n’hésitait pas à « traiter » les gens en objets d’expériences de laboratoire. À tout coup, une folie idéologique (j’y adjoins depuis toujours la psychiatrie au sens large) retrouve la catégorisation des délires. Pour moi, j’y insiste, la psychiatrie est le spéculaire de la psychose. Et cette psychose est éminemment perverse.
Le trouble dit mental étant, toujours à mon sens, une perturbation de la singularité (celle-ci étant en rapport avec la fonction Père), non sans lien avec la particularité du sujet, je crains (c’est un euphémisme, car j’en suis bien convaincu) que l’institution groupale ― tout le monde marchant à l’unisson ― chronicise le trouble quel qu’il soit, plutôt qu’elle n’en mette en question les ressorts, pour rétablir un fonctionnement subjectivement ad hoc des liens à l’Autre (pulsion, fantasme, désir, jouissance…). Car le sujet n’est pas individualisé comme le voudrait le groupe qui le prend (en tant que moi différencié mais identifié à tout autre) comme refermé sur soi. Non, il ne se définit que dans l’identification réversive (ni exactement ni différemment) à l’Autre. La fonction Père est l’indicateur de cette absence d’identité. Seul un numéro national d’identité pointe les individus en individus.18
Le groupe se présente en effet au travers du regard-symptôme porté sur ses membres, et leurs symptômes, les uns sur les autres, de là des énoncés préconstruits en loi institutionnelle et slogans (texto : « Il faut vite le faire sortir, car c’est un pervers », à propos de plus d’un sujet psychosé ― soit le contrecoup de l’institution sur le patient), questions prérésolues, vide opérant par forclusion…
Par contre le collectif assoit toujours à nouveaux frais la coordination fonctionnelle entre ses membres au profit d’une redétermination toujours hâtive des raisons subjectives.19 Fonction pour fonction, ce qui s’échange dans le collectif a toujours ― et proprement en tant qu’échange ― fonction (et non pas valeur) de parole.
Et la parole est en elle-même toujours productrice d’un en-plus20 dont le lien à la contingence reste indécidable. Il n’empêche que ce surnuméraire prend les caractères fixistes d’un réel.

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Ce surnuméraire (l’objet a dans la théorie de Lacan) n’est fixe que sous condition de ne pas vouloir prendre en considération ou simplement rappeler par soi-même la transformation (elle-même fractale) de la parole comme fractale. À première vue l’objet qui y ressortit paraît fixe.
C’est ce que Lacan pointe dans « L’étourdit » comme « fixion de l’opinion vraie »21, non sans ressource d’équivoque, comme il dit, car cette fixation ne saurait être que fictive (contingente d’abord, et indécidable ensuite à l’égard de cet inattendu ou, dit autrement, de cet impossible à écrire, soit l’effet de la fractalité de ces liens).
C’est dire que la construction d’un tel réel n’empêche en rien de le prendre quand même pour mouvant. La dynamisation de cet ensemble doit sa fonction à la productivité des signifiants émergeant de l’hypothétique (récursif) de la signifiance.
À partir de là, j’essaie de répondre à la question des moyens d’action de l’institution.
Si l’on retient l’organisation du collectif comme opératoire, c’est que les inter-relations entre ses membres produisent plus qu’elles ne valent par elles-mêmes et c’est de la production d’un tel surnuméraire réel que dépend, en retour, l’efficace de la prise en compte du trouble subjectif au travers des rapports d’échange qui autorisent cette prise en charge. Le décalage signifiant porté par la parole implique une prise de distance du sujet avec le symptôme. De là la raison même que prend le collectif à s’ordonner dans les liens de la parole à son objet surnuméraire ― réversivement ―, pour défaire par la parole ce que le discours aura construit.
*

3. Ce que l’institution ― organisée en collectif ― peut rétablir
chez chacun

Le soin « psychique », et le réel qui lui est afférent, impliquent de considérer que le trouble en question est toujours particulier. Ici se présente un problème, car le français est un peu court sur cette question du particulier. Alors que le latin le distingue entre aliquis (un quelque chose, un accident, une espèce…, mais aussi « tout un chacun » dans sa particularité qui vaut semblablement pour tous) et quidam (quelqu’un de spécifique). Je tiens, pour ma part, que le particulier s’oppose au général, comme le singulier à l’universel (et non le particulier à l’universel, comme c’est dit souvent)22. Dans mon schéma quadrique,

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« tout sujet » est particulier, par là il se distingue des idéologies d’un particulier globalisé et
partagé, il [n’]est pas tous. Ainsi la langue dite maternelle de chacun (le français qui lui est
propre, par exemple) n’est pas la langue (le français) qu’enseignent les manuels de grammaire et
les vocabulaires. Le général est lié à cette dérivation des particuliers et, en étant le commun de
l’affaire, il est nécessairement abstractisé pour ce faire (Marx) et donc réduit à ce qui échappe à
la dynamique de l’existence subjective : personne (  ) ne peut correspondre à un tel
essentialisme. De là les difficultés à situer ce qu’il en est du maternel qui le métaphorise (surtout
depuis la contingence subjective du féminin, quoad matrem, selon Lacan dans Encore),
en particulier pour l’institution qui se voudrait bonne mère ― mais ne saurait l’être par crainte
d’induire des positions autistiques chez ses ressortissants.
Par contre le singulier est pour moi l’au-moins-un de Lacan (qui se rapporte au
particulier par voie narcissique d’énamoration),

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soit la fonction Père, à laquelle chacun peut prétendre à se rapporter, même si tous n’y parviennent pas.23 En face de ce singulier se développe l’universel du pour-tout-homme (homme ou femme).
La nosologie psycho-psychiatrique, par contre, enseigne ― et ce n’est pas exactement à tort, si l’on dialectise ces données générales avec la question de la singularité ― que le trouble est toujours partagé. Et cela en deux sens : (1) partagé avec l’Autre qui en pâtit aussi et qui ne reste pas intouché24, (2) partagé avec d’autres personnes qui présentent des symptômes comparables. En fait c’est que l’inventivité signifiante est en toutes circonstances réduite et que ce n’est que de loin en loin qu’apparaît un signifiant neuf, éventuellement repris par d’autres personnes25 dans le passage du signifiant à la signification, soit à sa valorisation ― et de là à l’institution de cette valeur prise en objet (soit la plus-value) et à la mise en place de l’appareil qui en soutient la production (quand cet objet n’est par lui-même en rien productif, si l’on en efface la fonctionalité constituante). Ainsi, parmi ce que j’appellerais des signifiants neufs26 réévalués en référents nouveaux grâce à une refonte de la causalité, je citerai le monothéisme, la Trinité divine, la plus-value, l’inconscient freudien. Je les passe en revue rapidement.
Le monothéisme se prolonge jusqu’à aujourd’hui non sans produire de conflits entre ses divers avatars. Mais l’essentiel à en retenir est la fin des polythéismes. C’est insister sur l’unicité (l’unarité) de la signifiance (S1 chez Lacan), car je tiens que toute religion ou système politique global se fonde d’une théorie du signifiant, ainsi promue comme loi universelle. Mais cela ne se soutient que d’une confusion des raisons toujours conditionnelles (et même assurées d’être des conditionnelles irréelles) avec une cause régissant les lois auxquelles l’instauration d’une cause vise à aboutir de façon pro-thétique.
La Trinité est ainsi, avec tous ses attendus, une théorie du langage et du signifiant.
La plus-value spécifie une mise au net du langage dans la production matérielle qui en est l’effet.
L’inconscient reprend en termes reçus une théorie de la récursivité dans le langage, autrement que ne le suggère le cognitivisme de Chomsky.
Chacun de ces signifiants (dépassant leur suscitation particulière en valant dès lors concept et de là schématisme d’ensemble) produit un appareillage soutenant son

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institutionnalisation. Dés lors il n’a plus rien de signifiant et conduit (ou risque de conduire) à un index, indiciant toute particularité, un marquage faisant signe de reconnaissance. Respectivement, c’est le choix d’une politique organisée depuis la prêtrise ; l’universalisation (catholicisme) d’une théorie du signifiant se voulant dominante pour sa vérité vraie ; la généralisation de l’action politique instituée ; l’universalisation des particularités rendues comparables. Les appareils sont ceux des grandes religions, la centralisation papale de l’Église, l’organisation du prolétariat en classe briguant le pouvoir, l’émiettement des positions subjectives et les enjeux de massification vers lesquels la psychanalyse risque de verser dans son glissement psychothérapique. On voit bien qu’à tout coup la question est celle de la centralisation ou du décentrement, y compris en psychanalyse (I. P. A., A. L. I., A. M. P. ― je m’en tiens aux sigles reçus).
Dans ce contexte, guérir se définit ― et chaque item demanderait son développement propre ― par une réduction du symptôme, une réélaboration de la position subjective, une chute du « gabarit »27 qu’est l’objet a au profit d’une réassurance (s’il en faut) de la récursivité de l’Un.

4. L’institution soigne-t-elle ?

4.1. Conditions du soin, ou disons : de la réparation

Je définirai le soin « psychique » comme le rétablissement ― soit le passage à des effets subjectivement bénéfiques ―, et plus exactement le renversement des troubles occasionnés par l’absence (relative, absolue…) de prise en compte du refoulement primordial. Freud parle, quant à lui, de l’aspect pathogène du refoulement primordial. Je pense plutôt que ce refoulement, valant la récursivité de la signifiance, est tout à fait nécessaire. C’est bien plutôt à ce qu’il ne soit plus pris en compte qu’il en devient pathologique.
La réparation du symptôme par le sinthome ― comme on paraît le tenir de Lacan, ce qui n’est pas assuré ― demande une conception claire du sinthome. Je dis que le symptôme (soit topologiquement un quatrième rond dans le noeud borroméen, dès lors donné comme constitué de quatre consistances) transcrit falsidiquement (prédicativement, comme praticable « matérialisable ») le nouage, lui sinthomatique, du noeud borroméen (à 3 consistances). Ce sinthome est fonction Père, fonction de la castration, fonction phallique, récursivité, et donc échappement (le nouage borroméen échappe dans le noeud, disons qu’il y est dissous). Selon, Lacan le nouage borroméen correspond à ce que Freud cherche à saisir comme « réalité psychique ». Et c’est la fonction Père.
Par là l’institution ― « bien sonnante », c’est-à-dire opérant en collectif ― vise à rétablir la signifiance, soit à redonner la parole à qui ne s’exprime que symptomatiquement (métaphorisation corporelle, métonymisation de l’Autre, synecdoque des objectifications, etc.).

Cela nécessite une théorie de l’acte en institution.28 Cet acte n’a rien de psychiatrique (au sens d’un « passage à l’acte »), mais il serait bien plutôt un acte de passage au symbolique proprement dit de la récursivité signifiante. C’est la reconnaissance de cette dernière (soit celle de la castration dont le symptôme est évitement, démenti, dédit,…) qui soigne.
Cela implique que le sujet (dans l’échange, comme fonctionnel, imprédicativement parlant, et non en tant qu’objet-valeur d’usage) soit reconnu comme tel et ce faisant ce qu’il métaphorise en acte, soit la structure des échanges signifiants dont il est la manoeuvre et non tant le dépositaire (ce qui serait par trop fixiste). Le temps logique de Lacan en donne précisément la manoeuvre ― jusqu’à la rupture nécessaire avec tout le montage antérieur pourtant lui-même nécessaire à autoriser cette rupture. C’est là que je parle d’interconnexions ― mais pour en questionner la connectivité. Soit bien autre chose que des institutions militarisées, telles que toutes leurs solutions ne sauraient que confiner à une facticité de la signifiance (laquelle, je le rappelle, opère comme fonction Père, comme Un de différence, comme construction significantisée de l’Autre, tous concepts dès lors contredits par une telle facticité).

4.2. Comment le collectif peut-il être soignant ?

Il s’agit de plusieurs niveaux d’interrogation noués. Je n’en prendrai que deux en considération.

4.2.1. La prise en compte des conditions du soin par l’institution
organisée en collectif

N’oublions pas que ce sont ces conditions du soin qui donnent la tournure des raisons dont l’institution (sinon le sujet lui-même, si celle-ci est effectivement organisée en collectif) se dote pour opérer. La vérité du sujet s’y conjoint à la variété de la vérité qu’on y promeut, soit la variété (Lacan : « varité ») des sujets dont on soutient la démarche.
Dès lors les transferts qui s’y jouent, démultipliés, ne sauraient ― malgré toutes les tentatives de les mettre en série ― y fonctionner comme unifiés par un transfert sur l’institution, simple déplacement ou expansion du leader (le Père de l’institution). Car, à mon avis, on ne saurait soutenir une vérité propre de l’institution, le concept de vérité alors n’opérant en tout état de cause qu’en ce qui concerne la parole, soit celle d’un sujet, car l’institution ne saurait véritablement la promouvoir par elle-même, y compris si elle est constituée en collectif, ce qui n’est qu’un pis-aller.29
Aussi nous faut-il distinguer une fois de plus entre ce que pourrait être la structure proprement psychothérapique, sans plus, de l’institution comme telle, voire, pense-t-on, celle
du groupe, et la structure individuelle, mais c’est pour dire « particulière », du traitement comme échange. Car la parole ne saurait être commune.

4.2.2. La prise en compte de la récursivité signifiante et des antagonismes
que les institutions promeuvent, sciemment ou non, contre elle

Comme le trouble lui-même, l’institution est fondée de logiques prédicatives, classiques, tablées sur l’évaluation et la valorisation. Ce schématisme assoit la structure de l’institution, quel que soit son appareillage (groupal ou collectif).
Aussi, à partir du complexe d’OEdipe, Freud assure-t-il sa différence entre les narcissismes spéculaire (selon ce qu’en précise Lacan) et primordial (récursif). L’institution en vient à jouer ainsi de perversion, si elle ne prend pas en compte cette version vers le Père (au sens de Lacan) que Freud nomme « énamoration », et qui assure de mettre en oeuvre la récursivité de la signifiance.

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Cette « Père-version » (selon le jeu de mots de Lacan) ne peut opérer qu’à distance de l’objectification d’une institution se voulant maternelle (comme la langue), en jouant d’idéal.

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Ce qui se développe là plus avant est dès lors un choix fondamental entre jouissance phallique et jouissance de l’Autre.

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Faire le choix de s’orienter vers la jouissance phallique assoit l’existence du sujet. Celle-ci, comme la signifiance, est récursive, de ne se fonder que sur ses conséquences. Autrement dit une institution n’est soignante qu’à partir de telles conséquences, au titre desquelles vient jouer l’objet a (comme imprédicatif). En tablant son action sur l’objet a comme impossible à partager, l’institution organisée en collectif met en série des objets a toujours particuliers, sans jamais les identifier.

5. Culture et civilisation dans le soin

Je réponds maintenant à la question posée au § 1.1.
Il s’agit pour moi d’une différence radicale de collectivisation. La culture est celle du particulier dans le collectif, la civilisation est groupale, massifiante. Déjà Aristote jouait de mots à ce propos en passant de l’εθος (qui conduit à l’éthologie) à l’ηθος (qui conduit à l’éthique, via ce qu’on traduit par le « caractère » de l’orateur ― j’y vois l’indice de la récursivité de la parole).
À partir de là, il y a à reconsidérer en quoi les différences culturelles n’empêchent en rien la civilisation, quand l’inverse ne tient pas : la civilisation ne défend pas les différences culturelles.
Ainsi la psychanalyse est soignante à être scientifique, tout comme le sont l’économie politique marxiste, ou la physique quantique, les logiques imprédicatives, les mathématiques récursives. Ce n’est pas le cas de la psychiatrie qui s’en donne les gants ― mais sur un mode prédicatif, tout empreint de facticités en étant le pendant du délire, en jouant du cas type comme élément du regroupement nosologique ou en se faisant l’apprenti sorcier des tortures cérébrales (de la lobotomie à la médication camisole).
Sur le fond l’institution psychiatrique ne soigne pas par elle-même ― son semblant est bien loin de ce que la récursivité implique de semblance.
C’est qu’elle s’inscrit dans une civilisation de bien-être ― un bien-être que les objets seraient censés apporter à un sujet dont ils faciliteraient la vie ―, de la santé, du bonheur et autres ressorts idéologiques cherchant l’évitement de tout malêtre. Même le deuil n’y a pas de place. C’est qu’une confusion existe là à propos de la pulsion de mort (soit la prise en compte subjective de la récursivité de la signifiance30) et de la destruction (ou la mort) effective. Confusion entre le symbolique proprement dit et le réel.

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La civilisation n’incite pas à penser, mais à se conformer à des préceptes. Et quand je dis « penser », c’est pour éviter le néologisme de « significantiser ». La civilisation opère dans l’évidence et laisse de côté l’évidement (la raison positive de la castration valant récursivité).
Par contre une culture prend à son compte le malaise que la civilisation (globale, néolibérale) creuse en son sein, trou réel là encore, distinct de la fonction symbolique. Elle prend à son compte ce malaise pour le réduire. Dès lors une culture admet le pathogène et même les glissements de l’hystérie à la psychose, de la schizophrénie à l’obsessionnalité, et de chacune de ces rubriques à la perversion.31 Elle permet de sublimer et pousse (c’est assurément pulsionnel) la dite pathologie à l’art. Et plus au fond, elle supprime le trouble comme Freud l’interprète depuis son expérience sur l’Acropole : en repassant de la prédicativité de l’objet (Acropole) à la récursivité de la fonction Père.
C’est sur la seule condition de ces dérivations de la dérive de la signifiance que la culture, organisée en (petits) collectifs, est soignante. L’action particulière d’un psychanalyste dans le transfert l’est pareillement, sous condition de rapprocher divers analystes dans le collectif d’une petite collectivité, association reconnue ou non.
En se fondant sur une conditionnelle irréelle, la récursivité échappe à toute ontologie prédicative. Elle ne table dès lors que sur les glissements qui ne spécifient rien d’intangible, mais qui opèrent selon un changement constant. Ce que Freud appelle « clivage » est de l’ordre d’un tel passage, assumé de proche en proche et sûrement pas comme le barrage dont parle Bleuler.

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1 Lire R.L., Soigner avec la psychanalyse, séminaire 2012-2013.
2 Lire R.L., Le malaise dans la culture, Lysimaque.
3 C’est la même question que celle de Freud dans « L’analyse finie et indéfinie ».
4 J. Lacan, Autres écrits, p. 249.
5 Voir ce débat dans R.L., Politique du corps et de l’écriture, Lysimaque, 2015. Elle récuse ainsi le savoir textuel au profit d’un savoir référentiel.
6 Référence ici au Panopticon de Bentham.
7 R.L., Le schématisme borro-projectif, Lysimaque.
8 R.L., Positions subjectives données comme psychotiques, Lysimaque, 2017.
9 Voir R.L., « Positions subjectives dans la culture, auxquelles la civilisation contrevient en imposant une ontologie adaptative », Guayaquil (Équateur), 2017, repris dans R.L., Le malaise dans la culture, Lysimaque.
10 Sur ouverture et fermeture, voir Lacan, « Position de l’inconscient », Écrits, et R.L., Ouverture et fermeture de la psychanalyse, Lysimaque
11 Un gradient fondé sur les barèmes d’invalidité initiés par les séquelles de la Guerre de 14-18.
12 R.L., « Impact du néolibéralisme sur la psychopathologie », Lille, 2018.
13 R. L., « À la cause de la folie préférons la raison psychotique », repris dans R.L., Théorie fonctionnelle des psychoses, Lysimaque.
14 Ce n’est pas la dite énigme des « chapeaux rouges », lisible par exemple dans Hintikka.
15 À la différence de l’énigme des « chapeaux rouges », c’est l’existentiel de chacun qui est le moteur de ce paradigme des collectifs qu’est « Le temps logique… » de Lacan.
16 Je distingue « fonctionalité » (du latin functio, comme ratio → « rationalité ») en tant que constitution fonctionnelle et « fonctionnalité » en tant que tel mode de fonction.
17 Lire R.L., « La castramétation », 1990, repris dans R.L., La castramétation, Lysimaque.
18 Ici il faudrait discuter de ce en quoi l’idéologie et les appareils idéologiques d’État interpellent les sujets en sujets, selon Althusser.
19 Parler de hâte ici renvoie à la fonction de la hâte dans « Le temps logique… » de Lacan : il faut, vite fait, couper a vec toute l’élaboration idéologique de l’institution pour ne pas y être taxé soi-même d’inhumanité et risquer d’être « rejeté » en son intérieur. C’est pareillement un enfermement extérieur (Ausschließung).
20 Cet en-plus décale la structure de tout retour au même, voire de tout retour à une supposée origine. Par là une telle avancée se présente comme une structure hélicoïdale, telle qu’une bande de Moebius ouverte et répétée y donne accès.
21 J. Lacan, Autres écrits, p. 483.
22 E. Kant, Critique de la raison pure, Analytique transcendantale, livre I, chap. I, 2ème section.
23 R.L., « Tmèse », Cahiers de lectures freudiennes n° 18, Lysimaque, 1988, repris dans R.L., Théorie de la coupure en psychanalyse, Lysimaque.
24 Un reste transférentiel subsiste toujours, même commué en uniformisation groupale. Et je ne défends en rien à ce propos le concept de « transfert de travail », qui me paraît par trop synecdochique à faire groupe.
25 Je souligne ce faisant l’impossibilité de toute transmission d’un signifiant qui, aussitôt que produit, s’évanouit dans la suscitation d’un successeur sur lequel il s’appuie de manière rétrogrédiente.
26 Ces « signifiants » ne valent plus comme tels, mais uniquement transcrits en objets référentiels. Je le précise un peu plus loin.
27 Traduction reçue de template en topologie.
28 Lire R.L., Imprédicativité de l’acte psychanalytique, Lysimaque, 2018, relatif à l’institution psychanalytique.
29 Pour persister à régler des comptes : le heurt à la pensée unique entraîne l’éviction du « frondeur » par les tenants de la vérité craignant pour leurs oripeaux, et d’abord le maître à penser (référence à un épisode qui s’est joué au CMPP de Montgeron-Crosne).
30 En ce que la récursivité se fonde d’un hypothétique, soit d’une absence initiale qu’on peut assurément caractériser comme « mort » préalable.
31 C’est ce que Freud avance comme normalité, in « Des types libidinaux », soit le type érotico-narcissique-obsessionnel.

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