Lettre à l’adresse des instigateurs d’un « manuel de psychiatrie et de psychanalyse à usage courant »

Vous trouverez l’ensemble des échanges (entre B.Laurie, F.Nathan-Murat, René Lew et Gérard Pommier sur cette page (cliquer)

Ci-dessous:   Lettre de B.Laurie pour l’AECF

Nous nous joignons à l’association Dimensions de la Psychanalyse pour vous dire notre désaccord et vous rappeler la cohérence nécessaire à la défense de la pratique de la psychanalyse.

Il apparait, dès l’intitulé de vos propos, que vous n’allez pas dans le sens de cette cohérence.

Plutôt semblez-vous chercher une « cohésion », notamment taxinomique à laquelle nous ne pouvons adhérer et à laquelle nous devons même nous opposer.

 

Faut-il rappeler la vigilance à laquelle nous appelait Freud dans « L’analyse profane »? La psychanalyse ne relève pas de l’ordre médical. Elle se distingue, à ce titre, de la psychiatrie. Il n’y est pas question de relever les signes constitutifs de quelque diagnostic que ce soit dans la mesure où le symptôme ne relève pas d’une cause déterminée. Pratiquer la psychanalyse c’est se référer à la causalité psychique.
Le déterminisme causal impliqué par l’inconscient n’a rien à voir avec la causalité que met en œuvre la raison classique (discours du maître), qui ne souffre pas la « béance causale » et la temporalité spécifique qu’elle promeut.

De tout cela, je suppose que vous en ayez déjà connaissance puisque vous prenez position au nom de la psychanalyse.

Aussi, devez-vous être au fait de ce qui distingue le discours de l’analyste du discours de l’universitaire. Or l’usage d’un manuel diagnostic, quelque soit le vocabulaire qui l’habite, s’inscrit de fait dans des logiques médicales et universitaires.

Tenter de défendre la psychanalyse en allant à l’encontre de ses fondements revient à procurer à ses détracteurs les arguments en faveur de sa destitution.

Pourquoi chercher à maintenir un vocabulaire de la psychanalyse (rappelons la critique qu’a donné Lacan de la démarche de Laplanche et Pontalis) dans le cadre médical de la psychiatrie si cette démarche même fait partie de ce que la psychanalyse permet de subvertir?

Nous soutenons que défendre la psychanalyse dans nos institutions revient à soutenir la fonction signifiante par-delà toute tentative prédicative (dont les définitions communes et arrêtées) de faire taire cette fonction et, par là même, le sujet qu’elle induit et qui en procède.

Toute tentative de ce type correspond à la mise en échec de la fonction signifiante. La démarche psychanalytique s’en démarque et se justifie essentiellement par la défense et la mise en évidence de cette fonction signifiante, quelles que soient les difficultés qu’elle pose aux différents discours qu’elle détermine et qui tentent de la rejeter.

L’ idéologie d’un « manuel de psychiatrie et de psychanalyse à usage courant » ne saurait répondre à l’idéologie du DSM puisque l’objet de notre positionnement est la reconnaissance de l’inconscient (et donc la déconstruction des idéologies,lesquelles participent au coinçage symptomatique et à son aggravation).

 

Benoît LAURIE,

Président de l’AECF.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *